Passé virtuel
Acheté à 3 euros dans un magasin de jeux vidéos qui bradait certains dvds plus ou moins nanars, plus ou moins sympathiques (Halloween de Carpenter et Easy Rider
de Hopper voisinaient avec Maniac trasher et autres monstres des égouts...) et ayant eu de bons échos de part et d' autres, je
m' attendait à un petit film de série B, ce qu'est effectivement le film
mais avec un petit plus, ce supplément d' âme qui fascine. Si le rythme
avait été plus tenu (rien à dire le scénario est fascinant, sauf dans
la fin où l'on manque de s' embrouiller presque), on aurait tenu là, le
film culte, celui qui rafle les prix dans les festivals Gérardmer. Même
si ce n' est pas un chef d' oeuvre, le film surprend agréablement par
son originalité, ce qui est assez surprenant pour une production
Emmerich, le Besson américain (vous savez, le gars qui a réalisé Independance Day et Godzilla récemment...) de la série B à budget qui explose de partout.
Richissime génie de l'informatique, Fuller est parvenu à recréer
virtuellement l'univers des années 30, dans lequel il peut se projeter.
Au cours d'un de ses voyages, il fait une découverte qui lui vaut
d'être assassiné avant d'avoir pu en parler à son associé Douglas.
Suspect idéal, ce dernier va devoir enquêter dans le passé virtuel...
Sorti en 1999, en pleine période de Matrix, tout comme eXistenZ, ce
film n' avait sérieusement aucune chance face au bulldozer des frangins
Wachowski qui abordait le questionnement Dickien de la réalité à grand
coup d' élu et de mitraillage tandis que Passé Virtuel le traite avec
plus de subtilité dans un retournement de situation vers les 3/4 du
film, qui prend alors à contre-pied le récit de ce qui ne s' avérait
alors au départ que comme une banale enquête policière sur fond de
réalité virtuelle. Mais non, et c'est là que le scénariste et les
réalisateurs ont misés et réussi, de nous mener en barque dans quelque
chose qui va voler en éclat. Comme Alice de l' autre côté du miroir,
nous sommes de l' autre côté de la barrière.
Passé Virtuel fait partie de cette vague de renouveau de la science
fiction ("marre des vaisseaux spatiaux, la SF c'est pas que ça !" en
gros) apparue avec plus ou moins de Brio vers la fin des années 90 qui
a donné des films vraiment sublimes comme Bienvenue à Gattaca, The Truman Show
(oui c'est plus un drame et un questionnement sur la télé réalité mais
a ce stade, c' était encore un peu de la science fiction...Maintenant,
la réalité a dépassé la fiction), le remake de "la jetée" par Gilliam L' armée des 12 singes, Cube, Dark City, Ghost in the shell....
Avant de lentement commencer à s' éteindre toujours en nous proposant
des films intéressants dans les années 2000 mais moins importants comme
L' effet Papillon, Cypher, Simone (encore du Andrew Niccol comme Truman et Gattaca...Fait fort le mossieur)....
Ce qui est intéressant dans le film (et rien que pour ça, il mérite d'
être vu), c'est le questionnement sur la réalité par le biais du
virtuel, mais aussi l' idée des mondes en vases clos, si proches et
pourtant si lointains, un peu le genre d' idée qu'on aurait pu
développer pour Matrix Revolutions, la suite mollassonne du deuxième
volet déjà pas terrible du premier film de matrix...Vous savez, quand
Neo sombre dans le coma (déconnez pas merde, vous avez quand même dû en voir un extrait)... Et se retrouve dans un autre monde. A ce
moment là j' ai pensé "qu'est
ce que ce serait génial si on apprenait qu'il y a des millions de
matrices différentes et que le coma de Neo lui permet d' en changer".
Bien sûr, celà aurait été un risque, un piège tant pour le scénario que
pour le film mais cela aurait donné quelque chose de moins fadasse que
le résultat obtenu. Bref là le spectateur pouvait aller plus loin que
le film et un film qui permet de pousser son spectateur plus loin, ça s'appelle un chef d'oeuvre...
Aie aie, je m' excuse, c'est ma grande marotte ça, de taper sur les
ambulances Matrix, je suis désolé, je reviens à Passé virtuel. Une
autre chose m'a troublé après le film, et j' ai pensé que les
personnages virtuels ont leurs vraies vies parce qu'elles leurs ont été
programmés, ils n' ont pas conscience qu'il existe un monde au délà du
leur où ils ne sont, eux, que simulations, mais nous, ne le sommes nous
pas ? Qu'est ce qui nous permet de penser que nous ne sommes pas des
simulations pour des joueurs qui se transféreraient dans nos corps, à
notre époque comme les personnages du film se transfèrent aux années 30
?
Se poser ce questionnement après coup, comme après eXistenZ, montre qu'
effectivement avec un simple film, il y a matière a réfléchir là dessus.
Hmmm juste revenir à une comparaison avec Matrix, il y en a une, mais
elle est minime : Dans Matrix, le monde de la matrice est représenté de
teintes verdâtres et de monde uniformisé (référence aux circuits
intégrés, à la technologie etc, on s' en seraient doutés) tandis que
dans Passé Virtuel, le monde des années 30 se dote d'un léger voile de
Sépia (clin d' oeil aux vieilles photographies) qui n' en tache
pourtant pas la vision.
A part ça, ma sympathie va plus à ce film qu'a Matrix même si le
premier reste un divertissement sympathique lorgnant un peu trop sur
les jeux vidéos et l' animation japonaise (oubliez les suites).
Voilà, regardez Passé Virtuel, prenez du bon temps, soirée pop corn si
vous voulez, mais vous passerez un moment bien agréable avec un (très)
bon film de série B qui gagne à être plus connu.
J' espère ne pas avoir trop dévoilé le film...