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Chroniques visuelles
4 octobre 2012

La solitude des nombres premiers (2010)

 

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On dit d'un nombre qu'il est premier lorsqu'il n'est divisible que par 1 ou par lui-même. Alice et Mattia, solitaires et inadaptés, tels des nombres premiers, sont tous deux hantés par des événements tragique survenus durant leur enfance. Ils se rencontrent au collège, se reconnaissent et construisent alors ensemble un équilibre fragile avant de prendre des chemins différents.

Des années plus tard, Alice et Mattia portent encore les cicatrices de ce passé qui les a maintenus en marge de la vie. Alice s'est réfugiée dans l'exercice de la photographie. Mattia a fait de sa passion des mathématiques son métier. Mais leurs destinées semblent cependant irrévocablement liées...

 

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C'est un giallo avec du coeur. Ou plutôt un drame intimiste avec des morceaux de giallo dedans. Il semble apparemment qu'en choisissant de mettre en scène le best-seller de Paolo Giordano, Saverio Costanzo ait adopté plus qu'une approche personnelle dans ce qui aurait pu n'être qu'une banale adaptation du roman et opéré visiblement une "trahison" du matériau de base (Je n'ai pas lu le livre mais c'est ce qui ressort souvent de plusieurs commentaires). Et quelle adaptation, c'est un hommage à l'un des grands genres du cinéma transalpin qui transparaît là, transcendant une histoire presque des plus simples. C'est donc un drame avec des gens qui souffrent en eux-mêmes de traumas vécus dans leur enfance, de quoi faire un parfait film d'auteur avec tous les mauvais clichés qu'on pourrait y rattacher. Sauf que Costanzo choisit le baroque, l'écrin, la démesure. L'ensemble avance comme un fragile bélier sur la base d'une atmosphère sonore magistrale de Mike Patton qui renvoie directement aux grandes heures d'un genre qui a eu son heure de gloire dans les années 70.

 

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D'emblée le film annonce la couleur, ce sera grandiose, l'intimité de deux êtres, de leurs histoires personnelles et de leurs chemins qui se croisent et pourraient être voués à se rapprocher comme dans la vraie vie. Mais placé sur un piédestal où les codes du giallo vont servir à bâtir une histoire qui, par sa mise en scène prend directement à la gorge. Jeux de flashback entre le passé et le présent, remontée du souvenir comme autant d'indices de quelque chose de terrifiant qui, à défaut de meurtre-trauma comme chez un Argento, a pourtant tracé directement la personnalité de nos antihéros; caméra subjective, plans-séquences et montée d'une musique parfois ambiant, parfois presque rock, toujours d'une profonde empathie. C'est le parti-pris de l'inquiétante étrangeté qui est chaque fois la première peau du film à travers le regard de ces enfants, puis ado et enfin adultes qui pourtant n'ont jamais vraiment pu grandir, s'ouvrir à la société. Tout se déforme, la logique n'a plus cours, la cruauté de la jeunesse envers les inadaptés s'en retrouve multipliée. Et les sensations ressenties toujours, de nous perdre dans le fil du temps.

 

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On pourrait penser à d'autres films qui analysent le mal-être depuis le plus jeune âge, on a tort. Car tout dans La solitude des nombres premiers renvoie au film d'horreur. Mais une horreur mentale, viscérale. Pas de sang, juste des cicatrices, des scarifications. Si un passage risque de sombrer dans le glauque, il se trouve l'instant d'après contrebalancé par un retour au temps présent ou à une certaine poésie flottante. Et le film d'avancer en équilibre, toujours au bord du gouffre. Qu'il suffit d'y croire et le miracle se produit jusqu'à une fin, sans doute un peu étirée, mais tellement nécessaire dans sa douleur, son déchirement, sa résolution et sa promesse d'un possible espoir.

Chef d'oeuvre.

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Commentaires
N
Moi c'est le contraire, pas lu encore le livre et justement j'appréhende de le lire après avoir parcouru des passages où pour l'instant, ben... "ça ne prend pas". Pas rassuré...
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D
Bonjour Nio, je n'ai pas voulu voir le film adapté du roman (ce dernier m'avait beaucoup ennuyé). Ton billet me fait regretter. Bonne journée.
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