Côté découvertes musicales, la seconde partie de 2014 s'est vu plus tournée vers des découvertes plus anciennes que celles des sorties de cette année. Oh, évidemment il y a eu quelques bricoles mais les voyages, déplacements divers et autres manques de temps l'ont parfois plus emporté. Si bien que je me garde un peu de sous pour la dernière partie de l'année. Il faut dire aussi que d'ici décembre, un nombre incroyable de belles choses se profilent. Patience, donc. Mais pour l'instant, laissez moi évoquer quelques bricoles avec vous...
Kelis ouvre le bal. Je l'avais un peu perdue de vue cette jeune femme qu'on pouvait aisément classer dans le r'n'b très bien écrit et arrangé mais avec son Food, elle livre un disque de soul soft assez plaisant dont la production trompeusement simple cache en fait un album qu'il faut réécouter patiemment et plusieurs fois pour l'apprécier pleinement. Cela dit, on pourra déplorer de ne pas retrouver ces mélodies accrocheuses et addictives qu'on pouvait avoir sur Wanderland ou son premier album mais Food n'a pas à rougir de sa sobre beauté. Avec le retour de Beck, c'est l'une des surprises dont on n'attendait rien et qui ravit. A noter qu'elle n'est pas la seule revenante, un certain Aphex Twin arrive méchamment à l'horizon...
Largement plus dur d'accès, monolithique et ne pouvant que s'écouter d'un bloc, voilà To be kind, le nouvel album des fêlés des Swans. Mais être gentil ce ne sera pas pour tout de suite du moins. Au précédent album on avait un espèce de tête de caniche furieux sur fond noir, ici une tête de bébé larmoyant sur fond sepia. Logique en quelque sorte. Sauf que The seer, le prédécesseur pouvait prétendre à ce qu'on retire un titre du disque et l'écoute à part, ici, toute tentative est inutile. J'aurais même tendance à dire cher lecteur que si tu n'es pas passé par The seer ici, abandonne toute espérance. To be kind est sale, crasseux, méchant, mais aussi hypnotique, cyclique, répétitif à fond. C'est une transe sans fin où l'on se doit de larguer les amarres qui laisse entrevoir que The seer était presqu'un amuse-gueule à côté.
Kelis.
Changement total de registre avec Todd Terje qui livre là son premier album, entièrement axé électronique à fond. Le norvégien, que j'ai découvert pour l'anecdote dans un bar lors d'un quizz musical --il n'était pas employé au quizz mais la musique passait lors d'une des pauses entre les diverses manches. Je me précipitais pour noter le titre au plus vite avant que ça reprenne au plus vite--, prend un immense chaudron d'où il va malaxer diverses influences sans que cela ne sonne jamais cliché (un vrai tour de force en somme). On ressent donc plusieurs inflences diverses (électro-dance, les Goblins, Tangerine Dream, Vangelis, la pop music, les chemical brothers, le disco...) mais le tout reste plus qu'homogène. Et pour en avoir découvert quelques uns sur youtube récemment, les clips officiels du bonhomme sont joyeusement décalés. Les inrocks, jamais à un emballement près l'ont déjà sacré "classique de 2014", les petits rigolos. Bon, je n'irais pas jusqu'à reprendre les inrocks mais je trouve le disque assez formidable j'avoue.
Continuons dans les sentiers qui sortent de l'ordinaire. Got a girl n'est rien de moins que la réunion de deux talents à priori éloignés dans leurs univers mais qui ici, joints ensemble, font des étincelles. Donc, l'actrice Mary Elizabeth Winstead (Boulevard de la mort, Scott Pilgrim, le remake --patibulaire-- de The thing...) au chant et Dan the automator (Gorillaz) aux machines. Au programme, mélodies joyeusement 60's entre spleen et humour absurde (il n'y a qu'à voir le titre de l'album I love you but I must drive off this cliff ou un des clips). Et le pire (le mieux ?), c'est que ça marche. C'est presque parfait de bout en bout et surtout ça apporte un vent de fraîcheur dans des mois de juillet-août où l'on a vu aucun rayon de soleil.
C'est mon blog j'en profite pour mettre des jolies filles en plus.
Et revoilà le retour de Vangelis... WHOUPS, pardon, Brian Eno. Brian qui, avec Karl Hyde d'Underworld a eu envie de repousser la chansonnette pop. C'est de bonne guerre vu que le bonhomme a plusieurs cordes à son arc et qu'il ne se cantonne pas qu'à l'ambiant heureusement. La bonne nouvelle, c'est que l'album est sympa. Juste sympa et il ne révolutionnera pas la musique mais honnêtement, Eno a tellement fait pour cette dernière qu'il peut légitimement se reposer et sortir tout ce qu'il veut, je ne lui en tiendrais pas rigueur. D'autant plus qu'il y aura toujours des choses intéressantes dans le tas. Ici, on a un someday world très proche de la world music avec un côté pop électronique pas déplaisant. L'infatigable Eno a tellement aimé l'expérience qu'il a sorti dans la foulée un autre disque avec Hyde, High life qui lui, m'a un peu moins convaincu (moins pop, morceaux et structures plus longues et plus complexes). Faudra que je retente néanmoins au vu des bons échos qui commencent à se multiplier sur la toile.
Sally Folk nous vient du Québec. Sans surprise, étant allé dans ce beau pays il y a peu, j'en ai profité pour faire plein d'emplettes (les prix sont incroyablement moins chers qu'en France côté disques. Je ne vous cache pas avoir légèrement craqué. Le bon côté des choses c'est que côté achats de cds ou vinyle, ça m'a bien calmé pour un moment vu que je n'ai quasiment rien acheté dans ce domaine depuis (*)), notamment d'artistes typiques du pays. Sally Folk sort donc son premier album éponyme en 2013, que j'inclus ici dans ma sélection 2014 et c'est un rock-pop francophone de belle qualité qu'elle nous propose là, disposant d'arrangements soignés et d'un style 60's aussi évident dans le son que sa jolie pochette stylisée. Et si la jeune artiste ne peut pas forcément pousser les vocalises sur un plan époustouflant (avec le recul sa voix reste pour l'instant assez basique), elle arrive à dépasser cet état de fait par une production soignée, des textes et une belle mélodicité originaux et intrigants à l'instar de Mara Tremblay (voir plus loin).
Et puis des Bandes originales, plein de B.Os ! Cela faisait longtemps que je n'avais pas été aussi marqué par des compositions de films récentes. Sans doute parce qu'elles visaient à une certaine homogénéïté terne et sans aspérité dans plusieurs cas. Mais ici, j'ai craqué pour des oeuvres qui sont malheureusement pas toujours disponibles. Donc en plus d'écouter avec bonheur et un certain retard la bande son de Cloud Atlas (cf plus bas), je citerais : Under the skin (et ses motifs inquiétants qui résonnent en boucle), Les combattants et The canyons (électronique minimaliste et addictive fort plaisante dans les deux cas), The Rover (bande son hypnotique, éclectique et bigarrée nous faisant passer de percussions xylophonesques à de l'ambiant voire du r'n'b' chinois --quand Robert Pattinson écoute la radio d'une voiture à la nuit tombée--). Sans oublier le score du Godzilla récent où Alexandre Desplat montre que sur une grosse production, il peut lui aussi montrer les crocs et se mettre en danger. Que du bonheur.
Sally Folk, ex-fan des sixties...
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A côté de cela, pas mal de réécoute, découvertes de choses plus ancienne où je suis passé à côté pour plusieurs raisons. Le fait que je ne connaissais pas car on en parlait pas en est une bonne. Le fait que je ne sois pas né à l'époque en question en est une autre (inexcusable me diront certains puristes. Oh, on a pas gardé les playmobils ensemble, d'abord).
En séjour à Lille, un ami me parla avec force et passion de Crustation, groupe britannique de trip-hop n'ayant pas eu son heure de gloire lors de la sortie de leur unique album, Bloom en 1997. Les raisons de ce manque de succès sont inconnues (ou bien si tu as des explication cher pote qui me lit, je suis ok pour les avoir en commentaire). Quand même quoi, les 90's, c'est la décennie Trip-hop à fond (et noise, shoegaze et grunge aussi hein). C'est l'explosion de Massive Attack et Portishead pour ne citer qu'eux. Cela dit, le succès de ces deux là peut très bien avoir obscurci et privé de visibilité de nombreux autres groupes sans compter que la pochette de ce disque n'est pas très engageante au premier abord. Mais il ne faudrait pas se décourager pour autant aussi vite car la musique est superbe. Les trois programmeurs sur leurs appareils se sont adjoint les services d'une chanteuse, Bronagh Slevin qui semble chantonner d'une voix douce la majeure partie des sublimes écrins qui lui semblent dédiés. Des titres comme Reverie, Close my eyes, Purple ou Flame entrent directement au panthéon des meilleurs chansons de Trip-hop, c'est pour dire.
Dans la foulée, c'est aussi grâce à mon pote du ch'nord que je peux redécouvrir complètement Stereolab ou Sonic Youth dont je ne connaissais que deux titres pour le premier (dont le très chouette Miss Modular découvert au lycée quand je lisais --et grâce à eux-- les Inrocks) et que je n'avais que l'album Daydream nation pour le second. Autant dire que là j'ai de quoi me plonger dans des expérimentations sonores et musicales pour un bon moment avec un certain bonheur.
A nouveau un saut vers le Quebec avec un groupe plus ancien dont j'ai déjà parlé avec plaisir dernièrement et puis Mara Tremblay. Tu m'intimides daté de 2009 est véritablement son avant-dernier album en date car depuis 2011 et son album éponyme, plus de nouvelles. Comme pour Sally Folk, c'est à nouveau du bel ouvrage ici clairement presque plus "organique". Sans être non plus comparable au mur du son de certains grands disques de shoegaze (je ne peux m'empêcher inévitablement de penser à My bloody Valentine période Loveless ou le premier Ride), il y a bien une production sonore vaporeuse et d'autant plus impressionnante quand on l'écoute au casque. La variété d'instruments, le wurlitzer en tête, souvent accompagné de guitares accoustiques permet une certaine ambiance riche que bon nombres de groupes et artistes en France n'ont pas à mon grand regret. Je me demande si je ne préfère pas ce disque à celui de Sally Folk avec le recul même si les deux sont vraiment bien sympas. Bonnes pioches.
Mara Tremblay. Non parce que j'ai réduit la pochette. Et puis on voyait pas bien. Voilà. Bon, heu, là on voit bien. L'image est jolie, non ?
Gros choc par contre avec The Dave Brubeck Quartet dont je ne connaissais à la base que le monstrueux Take five avant de m'apercevoir sur le même Time out que Blue rondo à la turk était aussi un sacré classique du genre que j'oubliais un peu constamment. Mais tout l'album est fabuleux si l'on aime le jazz. La surprise géniale c'est le Jazz impressions of Japan, quasi méconnu et qui touche au chef d'oeuvre indispensable ici (encore un truc à rajouter dans ma liste des indispensables en disque, pfiouuu). Lors d'une série de concerts à Tokyo et Osaka en 64, Dave Brubeck et son groupe, fascinés par le pays, décident de livrer un recueil musical de sentiments, sensations ressenties vis à vis du pays. En résultent plusieurs morceaux qui touchent de près comme de loin à un certain état d'esprit japonais transposé en musique. Un exemple parmi d'autres, Koto song où la délicatesse du piano remplace les cordes du koto tandis que la batterie, s'étouffe volontairement en arrière plan et que le saxo place quelques notes très asiatiques. Cela pourrait être cliché, ça n'en sonne que plus juste car jouant sur ce qu'on connaît du pays de par notre propre culture et l'enrichir ici avec une réinvention qui d'une certaine manière touche au génie.
Enfin Roberta Flack. Je ne connaissais d'elle que son Killing me softly par le biais de la reprise des Fuggees (les années collège donc...). Mais le titre de Flack est aussi une reprise en soi (directement du folklore peu connu). En fait Roberta Flack ne fait quasiment que des reprises mais la majeure partie du temps, elle les fait divinement bien. Il ne faudrait donc pas la résumer qu'à un seul titre ou un seul album (éponyme). Citons donc pour le coup les très réussis First take (à dominante jazz) et les non moins fabuleux Feel like makin' love (dont j'ai mis la pochette) et Blue lights in the basement (plus soul). De bonnes entrées vers son imposante discographie qui contient son lot de hauts et de bas mais mérite assurément qu'on s'y penche.
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(*) Bon, un petit Weather Report que j'avais déjà en vinyle à un festival il y a quelques jours, admettons. Mais c'est tout, Votre Honneur.
Quand à leur succès, plusieurs choses. La première la chanteuse. La miss sur son blog indique pour faire très simple que ce fut une expérience fort plaisante mais elle ne souhaitait pas la reproduire. Pour elle, sa carrière se situe plus vers Cesaria Evoria. Elle a sorti un bouquin et aux dernières nouvelles à un resto avec son mari.
La seconde, qui est plus spéculatif. Le producteur un certain Adrian Utley (oui oui, l'une des mec fondateur de Portishead !!) aurait mollement défendu leur cause malgré son enthousiame sur l'écoute des EP.
Voilà voilà, c'est à peu près tout ce que l'on sait sur ce groupe maudit qui a balancé une unique claque dans la gueule !!