La tête pleine de rêves, Amélie, 20 ans, revient dans le Japon de son enfance. Elle propose des cours particuliers de français et rencontre Rinri, son premier et unique élève, un jeune Japonais qui devient bientôt son amant. A travers les surprises, bonheurs et déboires de ce choc culturel drôle et poétique, nous découvrons une Amélie toute en spontanéité et tendresse, qui allie la grâce d'un ikebana à l'espièglerie d'un personnage de manga.
Un ami me confiait au vu du résumé (que je reprend tel quel hopla) que le film ne le tentait guère et qu'il avait peur que ça aligne clichés et poncifs. Moi-même en fait je n'y serais pas allé si je n'avais pas été frappé par la très séduisante affiche et le fait qu'il s'agisse d'une adaptation d'un roman d'Amélie Nothomb. Deux points à préciser d'emblée du coup : Pauline Etienne que je ne connaissais pas du tout jusqu'alors (au contraire d'Anaïs Demoustier) et que je découvrais déjà grâce à ce visuel qui ressemble à la fois à une de mes ex (eh ouais !) en plus d'avoir les cheveux courts ce qui n'est ma foi, généralement pas pour me déplaire. D'autant plus que le symbole japonais cercle rouge sur fond blanc se prête très bien à une image iconisée et simplifiée, purifiée et que je trouve assez directe et séduisante. De toutes façons on pourrait tout mettre avec le Japon que ça passerait très bien je pense (attention lien vicelard mais rigolo quand même).
Pauline enseigne comment manger des fruits pulpeux sans en mettre partout.
Second point, j'ai été fan d'Amélie Nothomb a une époque pas si lointaine (alors ceux qui pensent que je ne lis que de la SF, c'est au coin direct ! Sales gosses, non mais !). Une dizaine de roman et une dédicace sur mon Robert des noms propres (j'aurais dû prendre ma cass-dédi sur Stupeur et tremblements je me dis) plus tard, ma passion s'était étiolée pour Amélie. Ce sont des choses qui arrivent dans un couple que voulez-vous. Avec une régularité sans faille à faire pâlir le Beaujolais nouveau et le Woody Allen annuel, j'ai vu chaque nouveau petit-né de Nothomb installer une certaine routine qui allait de pair avec un certain égo que je ne supportais plus trop. Et voilà comment un couple si beau, si jeune, si fort en kératine (elle surtout, moi je perds mes cheveux mais j'ai déjà élu Jason Statham comme modèle à suivre donc je m'inquiète moins pour mon cuir chevelu) en arrive à ne plus s'aimer. C'est la vie que voulez-vous. Mais nous sommes restés bons amis, du moins j'ose le penser et chaque fois qu'un nouveau Nothomb sort je m'informe avec une curiosité toujours là (sans non plus forcément le lire hein).
Il y a un fait intéressant qui m’a donné envie de chroniquer cette adaptation plutôt qu’une autre (coucou le ciné-club de Potzina au passage), c’est une certaine notion de vérisme et elle pourrait tenir en deux exemples simples, ceux du respect du matériau de base comme du vécu.
Dans le premier cas et sans même avoir lu Ni d’Eve ni d’Adam dont il est adapté, j’y retrouve le ton de Nothomb, si caractéristique, entre tendresse et autodérision prononcée. En effet comme pour Stupeur et tremblements (qui se déroule d’ailleurs à la même période) ou Le sabotage amoureux, Amélie parle d’elle et elle n’est jamais meilleure que dans ce cas de figure justement. Le lecteur habitué aura donc la joie de retrouver ce qui le faisait déjà sourire avec une certaine tendresse dans les romans cités tout comme la très bonne adaptation qu’avait livré Alain Corneau avec le film tiré de Stupeur. Et cela j’aurais tendance à dire, c’est déjà en soi un gage de réussite que de faire ressortir une matière qu’on n’a pas lue, qu’on redécouvre / avec laquelle on rouvre le dialogue.
Le second cas, je vais le rapporter à une expérience personnelle qui fait écho à une poignée de scènes du film (et donc du livre). Pas besoin de partir au Japon pour faire l’expérience d’un déracinement et du choc des cultures, les exemples abondent un peu partout. Par contre, quand Amélie décide d’escalader les pentes du Fuji pour faire « le vide » et combler un manque, j’y vois une superbe fuite en avant que je retrouve dans mes marches plus ou moins longues en territoire Picard comme Parisien.
A nouveau ce besoin de renaître par cette marche si chère au cinéaste Werner Herzog (cf. ce livre), d’expulser quelque chose, une colère, une déception voire un sentiment de joie trop immense pour le déverser dans autre chose qu’une catharsis qui se rapproche de la transe en ce sens que le mouvement englobe l’être et qu’on avance, on ne réfléchit plus. Pour reprendre le King, c’est presque marche ou crève sur un ton plus allégorique qu’horrifique. Comme pour certaines musiques, certains films « hypnotiques » (mais pas forcément expérimentaux), voire certains écrits (je veux bien croire que Kerouac ait déversé tout son être sur un seul long rouleau de papier quand il a écrit Sur la route).
Amélie met la fête et la joie dans les boums.
Et ça, cette poignée de scènes dans ces territoires enneigés et sublimes qui ne doit bien totaliser que 10 voire, je sais pas, 5 minutes de film à peine, c’est ce qui déclenche en moi le « oui, c’est tout à fait ça ! » du vécu et qui, par là même et même si le film est juste bon, l’élève chez moi sur un certain piédestal de respect. J’ai ressenti cette impression de vérisme à nouveau pas plus tard qu’hier matin au terme d’une nuit blanche dans le cadre de films ayant pour thème le vampirisme et que clôturait l’excellent Morse de Tomas Alfredson. Non pas que je redécouvrais le film (il est encore trop récent pour moi) mais j’étais stupéfiait de voir qu’il passait non seulement comme une lettre à la poste à la revoyure (alors que le premier visionnage fait clairement comprendre au spectateur cinéphile pas forcément habitué aux rythmes lents et contemplatifs qu’il va en chier un peu) et que les détails de la vie du jeune garçon, sa vie avec son père, sa mère ou Eli étaient dans une forme presque documentaire naturaliste au sein de la fiction avec ce vécu qui revient en nous au « bordel mais oui c’est trop ça ». Now you know.
Bref j’ai aimé cette adaptation de Ni d’Eve ni d’Adam en film sur l’instant. J’ai adoré Tokyo Fiancée sur le recul. Et le film m’a en plus donné envie de me relire un peu des dernières œuvres d’Amélie Nothomb, histoire de renouer le chemin à parcourir, ce qui n’était pas une mince affaire en fin de compte. Arigato Stefan et Amélie-San, vous m’avez mis K.O avec trois fois rien.
Comme je te l'ai dit sur FB, je connais Pauline Etienne pour l'avoir vu dans La Religieuse. Ce n'est pas un chef-d'œuvre mais il y a de bonnes choses dont Pauline et Isabelle Huppert. Et puis l'histoire est flippante à certains égards.
Je m'égare un peu
Merci pour ta participation Nio !