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Chroniques visuelles
17 avril 2015

Les retombées

 

les_retomb_es

 

En 1979, Jean-Pierre Andrevon imagine un coin de France, le jour d'Après.

 

J'ai effectué un petit retour par la science-fiction depuis peu après des lectures des plus variées. Le Nuage noir en était certes, mais plus de la Hard-Science dont le style un peu vieilli et bourré de descriptions ne s'accordait que peu avec mes préférences. La petite ogresse était du fantastique intimiste et poétique. Et puis entre-temps entre ces lectures "officielles" chroniquées pour le blog et le présent petit livre dont je vais parler, il y a eu un peu de tout. Je cite pêle-mêle en vrac du policier doublé de chronique rurale (Rouge ballast chroniqué chez Potz'), des BDs érotiques (dont l'excellent Deviances de Bernardo Munoz et le rigolo Couvent infernal), du classique littéraire (L'amant de Lady Chatterley), du classique de la BD (des astérix), une biographie romancée du pianiste Thelonious Monk (dont j'espère parler sous peu sur le blog), la première BD officielle de Tim (Quotidien survival), une autobiographie d'Haruki Murakami par lui-même (Autoportrait de l'auteur en coureur de fond en audio-livre, que je termine tranquillement là, au compte-goutte), une étrange histoire d'amour déviante entre une jeune femme et un ordinateur mégalomane (La semence du démon que je viens de finir là, à l'instant. Le titre est un peu ridicule mais le bouquin est très bien. Une adaptation en avait été faite en film en 1977 avec Julie Christie, Generation Proteus que je brûle maintenant de voir. Dans la même lignée que Rosemary's baby ce bouquin). Pfiouuuu, je crois que le compte est bon.

 

Et donc Les retombées où, je ne le cache pas, c'est sa couverture de nuage radioactif sur fond gris qui m'a tout de suite intrigué, surtout avec la 4ème de couverture se réduisant à une seule ligne énigmatique, telle que je la livre également. La science-fiction à la française est moins répandue que sa cousine anglo-saxonne et c'est un tort au vu de la richesse du langage exploité par les écrivains de nos contrées, sans compter l'imagination assez folledingue que ces derniers emploient généralement. C'est bien connu, en France, on a pas les moyens, mais on a les idées, alors côté livres, on a de quoi être servi et on a de grands auteurs même si généralement on passe toujours à côté (l'effet "nul n'est prophète en son pays" qui marche très bien avec les cinéastes aussi). Autant prévenir, Les retombées ne dépeindra pas un futur bourdonnant d'inventions fabuleuses et propre à mille rêveries de ce côté là. Non, ici, on est dans un futur pas si éloigné, voire un présent parallèle en ce sens que ce qui arrive dans le livre pourrait très bien arriver n'importe quand et c'est inquiétant.

 

boom

Et boom.

 

La nouvelle, courte et implacable, met en scène dès le début, 5 personnages d'âges et de sexes différents tous situés dans le même coin de campagne, qui, à divers distances, voient au loin l'éclair et le nuage avant d'être frappés par le fameux souffle brûlant. Des gens qui ne se connaissent pas et se retrouvent, perdus, haletant et tentent de lier connaissance malgré le choc de la situation. Par la suite, ils sont récupérés par l'armée et parqués comme bon nombre d'autres, dans un camp vite construit à la va-vite mais la situation ne s'arrange guère. Avec une écriture simple mais nette, Andrevon décrit les sensations et sentiments mêlés de François, le narrateur, jeune ingénieur d'une trentaine d'années, pris dans la tourmente. Ce qu'il ressent et voit chez les autres, ses pensées et peur d'être irradiée tout comme de la situation qu'il tente de rationnaliser sans jamais y arriver.

 

Et Andrevon fait assez fort pour rester dans un sentiment de flou qui ne se relâchera pas du long. On ne montre pas les symptômes, on ne peux que les imaginer. Le narrateur lui-même n'inspecte pas son corps, au lecteur de se poser des questions hors-champs (le fait que des gardes rient en lisant son dossier n'augure pas forcément quelque chose de bon) ou d'imaginer des horreurs. De même, comme l'on est embarqué avec le personnage, on a une vision forcément restreinte des lieux et de ce qui se passe. On dit aux "rescapés" du camp que le président va faire une allocution, il y a des haut-parleurs mais finalement, on entend rien. Comme si même tout le pays lui-même était à la dérive. A un moment, on bute dans un corps au sol dans le brouillard, corps qu'on a même pas pris la peine d'enterrer. On imagine des tirs de fusils et un rappel douloureux de situations étant déjà arrivées dans les camps au cours de la seconde guerre mondiale, mais comme le héros, on ne peut que spéculer et la fin ouverte ne peut que nous laisser intrigués. Et c'est tout à l'honneur d'Andrevon puisque vu la teneur de ce court récit, on imaginait mal une fin heureuse, pas plus qu'une fin pessimiste qui n'aurait fait qu'entrer l'histoire dans une dimension glauque et sordide là où tout le reste est des plus sobres.

Bref, un récit à lire au plus vite (et à conseiller même dans les écoles et collèges).

 

En bonus, quelques pages qui ont le mérite d'évoquer l'auteur ainsi que le contexte d'écriture de la nouvelle, dates historiques liées à la bombe atomique en main (et ce n'est pas plus rassurant pour notre époque actuelle) avec aussi quelques films et ouvrages à voir et lire (j'en connais quelques uns là-dedans tiens).

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Commentaires
A
Le sujet me fait penser au film MALEVIL, tiré d'un bouquin de Robert Merle, et qui racontait le périple de survivants dans la campagne française après une énorme explosion nucléaire. Avec Michel Serrault, Dutronc et Villeret… Film minimaliste sans sfx délirants ni guerriers de la route hirsutes mais très prenant et glaçant…
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P
Tu en parles bien, ça donne envie :) Je ne connais cet auteur que de nom, je n'ai jamais rien lu de lui. Tu as raison, un de plus dans mon pense-bête ;)
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