Affiche originale du film en américain.
Harry rencontre Julie dans un musée d'Histoire Naturelle. Le courant passe bien. Très bien même. Et après tout un après-midi passé ensemble, les deux tourtereaux décident de se revoir au plus vite : Harry récupérera Julie au Dinner où elle bosse, sur l'avenue de Miracle Mile, le soir. Sauf que, coup du destin imprévu (et l'on sait que souvent la vie est une belle saloperie), l'hôtel où notre héros fait une petite sieste subit une panne de courant. Harry se réveille trop tard. Effrayé, il se précipite au petit bar-resto mais Julie n'y est hélas déjà plus. Profitant d'une cabine téléphonique, il lui laisse un message en s'excusant. Quand le téléphone de la cabine sonne peu après, il se précipite, croyant que c'est sa dulcinée ...pour en fait tomber sur un étrange appel téléphonique inquiétant qui déclare à mots couverts que des lancements de missiles nucléaires vont avoir lieu dans près de 70 minutes. Canular ? Véritable appel anonyme ? Le trouble ne fera que se muer en une dangereuse angoisse lancinante...
Voici typiquement le genre de petit film culte injustement tombé aux oubliettes (ide nos jours il est encore pas mal oublié des classements de films côté science-fiction) et qu'on réévalue dorénavant (Merci Blaq Out qui l'a sorti en DVD et blu-ray le 13 novembre 2017). Il n'est pas le seul loin de là et on guette probablement tous entre cinéphiles nos petits chouchous en espérant une édition récente à portée de main (pour ma part j'aimerais enfin voir chez nous un A boy and his dog, alias Apocalypse 2024 et autres Onde de choc (Wavelenght), Le jour d'après --non pas le film de Roland Emmerich, ce film !, etc etc...). Cela dit les éditeurs actuels font un boulot formidable et quand on voit depuis quelques années les sorties qui viennent chez Un chat qui fume, chez Blaq Out, chez The ecstasy of films.... c'est fabuleux. Merci les gars, on vous aime.
Affiche "remastérisée" pour sa ressortie en salles.
Si Miracle Mile est tombé aux oubliettes c'est à cause de plein de facteurs du style "pas de chance". Déjà (ce n'est pas précisé dans les bonus), il faut noter que le film va mettre près de 10 ans à être fait. Steve de Jarnatt, le réalisateur racontait ainsi lors de sa venue en festival peu avant une projection officielle au cinéma cette année 2017 qu'une première mouture du scénario avait été faite pendant la période de "dégel" des années 80. Si vous avez bien remarqué à ce moment là, les films mettant en scène des relations contrariées entre Américains et Russes pullulent (même Schwarzy fait le russe. Il faut que je voie ce film, bordel). Donc de base l'ennemi avec les missiles nucléaires devait être russe.
De Jarnatt n'ayant alors signé aucun film avant cela, (Cherryh 2000, son premier film avant Miracle Mile viendra pendant cette période constante de réécriture, de remaniements afin de garder le contrôle de son film), un gros studio studio (la Warner si je me souviens bien) est d'accord pour que le film soit tourné. Mais pas par lui. On lui fait bien comprendre qu'il semble talentueux mais non merci côté caméra on a pas besoin de vous, on veux un gros truc avec explosions partout, partout. Horrifié, De Jarnatt se barre donc avec le bébé et l'eau du bain. C'est son bébé, il le réalisera.
Le temps passant, les relations américaines se stabilisant avec le supposé ennemi russe de toujours, Jarnatt en profite donc pour remanier en profondeur son scénario (exit les russes mais on garde le constat terrifiant du nucléaire) tandis qu'il tourne Cherryh 2000. Il finit aussi par trouver une petite boîte, Hemdale, qui accepte de le produire. Pour un petit budget de 3,7 millions de dollars. Ce qui contraint Steve de Jarnatt a user du système D pendant tout le film (et ça fait merveille, rassurez-vous). Exit les stars et tant mieux si ça ne bouffe pas tout le cachet du film.
Pour autant, encore un malheureux concours de circonstances, quand il sort finalement en salles en 1988 (janvier 1990 en France), la guerre froide vient de se finir. Les gens n'ont plus envie d'avoir peur avec le péril nucléaire. Sa sortie est donc plus ou moins sabordée et passe inaperçue, le réalisateur racontant que le film avait tenu miraculeusement à l'affiche avant de se faire balayer deux semaines plus tard par un énorme mastodonte du style James Bond ou autre...
Au vu de toutes ces péripéties au final, Miracle Mile s'avère un petit miracle. Une perle.
Le film commence comme une vague comédie romantique avant très vite de se placer dans le film d'anticipation dramatique avec cette course contre la montre inattendue et désespérée. Je n'en dirais pas plus pour ne pas déflorer l'intrigue sinon que vous pouvez y aller les yeux fermés. Les acteurs même peu connus assurent le boulot. Steve De Jarnatt se débrouille très bien à la caméra et au scénario (finement écrit d'ailleurs, soulignons le). Et puis il y a la musique de Tangerine Dream qui rythme génialement tout ça.
On a tendance à l'oublier mais avec sa musique électronique, Tangerine Dream a souvent fourni un écrin sonore ambiant et/ou énergique à même de transposer les émotions ressenties durant le film. Souvenez-vous des bandes originales de Near Dark de Kathryn Bigelow, Sorcerer de William Friedkin, Le Solitaire de Michael Mann... Ici, ils restent fidèle à leur style et nous font assez bien ressentir l'urgence de la catastrophe au gré d'un "After the call", la beauté de l'instant présent sur un "On the spur of the moment" ou la mélancolie avec "Final Statement".
Bref, Miracle Mile s'avère culte et immanquable. Avec sa sortie en DVD et Blu-ray depuis peu, vous n'avez plus d'excuses pour vous y plonger directement !