Inside (2011)
Mais sorti chez nous en 2012.
Adrian et sa petite amie Belen sont jeunes et très amoureux. Mais lorsque Bélen commence à douter de la fidélité d'Adrian, elle décide d’éprouver ses sentiments en lui faisant croire qu’elle a disparu. Elle s’enferme alors dans une pièce secrète de la maison dont elle seule connaît l’existence. Dans sa précipitation, elle oublie la clé à l’extérieur. Piégée derrière un miroir sans tain, elle va assister impuissante à la nouvelle vie d’Adrian sans elle... ou presque.
Que voilà une intéressante surprise. Passé presque inaperçu chez nous, ce film moitié thriller paranoïaque, moitié drame d'Andrés Baiz mérite pourtant d'être vu (je l'avais repéré pour ma part quand j'avais vu sa bande annonce quelques mois de cela déjà). Déjà parce qu'il est rare de voir chez nous des films colombien, ensuite parce que même honorable et sans révolutionner nullement le genre, il fonctionne sur une petite mécanique discrète et bien rôdé qui se sert habilement des lieux communs du huis-clôs et des questions que le spectateur se pose inconsciemment dans le même temps de visionnage du film ("est-ce que telle ou telle personne s'en sort ?"). Pourtant c'était mal parti.
A noter qu'on aura beaucoup de scènes de nu dans le film. Une intéressante plus-value pour le spectateur mâle (hétéro de surcroît). Je dis ça, je dis rien hein... (*)
D'abord parce que des trois personnages principaux, celui du mec s'avère d'emblée assez proche du connard fini (ok c'est le rôle qui veut ça mais bon) avec un acteur doté d'un jeu monolithique qui le dessert incroyablement bien (ok c'est son jeu d'acteur qui veut ça mais bon). Ensuite parce que les personnages et l'introduction du film semblent creusées à la va-vite à coup de pelles. Ils ont tous un problème d'égo et ne fonctionnent presqu'à la jalousie et au misérabilisme. On ajoute à ça des policiers qui ne sont que des caricatures et l'on craint vite le pire. Pourtant Andrés Baiz sans se décourager tisse lentement un climat inquiétant un brin trop surligné dans un premier temps mais on se prend lentement au jeu amusé. C'est passé sa première demi-heure que le film se réveille et nous implique vraiment en basculant de l'autre côté du miroir (littéralement) en opérant un flash-back sur le troisième personnage jusqu'ici absent, Belem. Comment a t-elle pris cette décision (stupide et immature) de vouloir jouer un tour cruel à son petit ami, comment cela se retourne contre elle et surtout comment va t-elle survivre et s'en sortir ?
A partir de ce moment le film prend une tournure passionnante en ce sens que Baiz se permet de basculer le regard et donc le point de vue du spectateur en changeant de place. "L'ex-petite amie" qu'on jugeaient répudiée et indigne nous émeut soudain et même si cela n'excuse en rien son geste initial, on s'intéresse à son calvaire et c'est du coup la nouvelle girlfriend qui a pris sa place chez le monolithique-tu-comprends-je-suis-un-homme-sombre-j'ai-mes-secrets-Adrian qu'on regarde sous un autre oeil. Celui d'une parvenue qui est bien contente de s'être trouvé un mec riche et compte bien en profiter. D'autant plus que découvrant lentement le fait que Belem serait encore dans la maison, elle s'en accomode d'autant mieux en en disant rien à Adrian. Pourquoi gâcher cette nouvelle relation en faisant réapparaître la disparue ? Qu'elle reste à sa place. On en plaint dorénavant Belem et on finit par avoir envie que la jolie Fabiana s'en prenne une dans la tronche ! C'est au final une intéressante étude de la jalousie et de la bassesse enrobées dans un emballage cruel qui finit par surprendre agréablement.
Et cela est d'autant plus intéressant qu'à ce stade le cinéaste abandonne l'aspect purement artificiel et plein de gros sabots de la première partie censée être angoissante et va jouer donc pleinement sur le huis-clos saupoudré de drame en oubliant pas au passage de petites pistes diverses dont une mini-critique de la Colombie, terre d'accueil des nazis (ici la fameuse cache dans la maison fut crée par un ancien officier qui avait paré au fait qu'on puisse le retrouver). Pistes pas toutes développées d'ailleurs mais cela n'est pas au fond le propos du film qui veut avant tout surprendre le spectateur et proposer un vrai film de cinéma (malgré une première demi-heure un brin téléfilmesque qu'il faut surmonter afin d'accéder à ses vrais enjeux). C'est au final parfois un peu bancal mais le film, porté par ses interprêtes féminines et son histoire, marche suffisamment pour qu'on passe un agréable moment. Une bonne surprise.
(*) Je tenais à préciser au passage en apparté que ma remarque ne visait à léser personne. Comme Jordan me le faisait remarquer en commentaire, c'est vrai que ça peut isoler par exemple les lesbiennes ou bi alors que mon propos ne tendait pas à ça. C'est vrai que dans le fond c'est bien sûr autocentré sur quelque chose d'assez hétéro. Il faut dire que pour l'instant j'ai quasiment pas (beaucoup ?) de lecteurs/trices LGBT qui suivraient assidûment mon blog et se manifesterait de temps à autre pour me conseiller des films que je pourrais chroniquer ou apporter une correction si je venais à parler de "Hors les murs" ou "Week-end" (non, pas le film de Godard) par exemple. J'ai des potes gays mais qui manifestement ne s'intéressent pas à mes chroniques (dommage). Non, la remarque était plus à prendre comme je le dis plus bas en commentaire dans quelque chose de plus large où l'hétéro est la norme au sens large et basique mais n'est en aucun cas une restriction et il y a bien sûr aussi bien des gays ou bi fanas d'horreur ou de corps féminins grâcieusement dénudés évidemment. :)
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DVD reçu dans le cadre du programme DVDtrafic de Cinetrafic et en collaboration avec M6-SND, que je remercie chaleureusement tous deux. Pour le coup dans la chronique, j'ai repris l'affiche de la sortie du film (sorti le 4 juillet 2012 chez nous en salles mais seulement en DVD depuis le 3 avril 2013), plus intriguante que celle de la collection Mad Movies où le film est sorti, qui en fait clairement trop (ce n'est pas à proprement parler un film d'horreur avec limite la nana qui va surgir de derrière la vitre comme le laisse supposer cette jaquette cliché). Une fois de plus, je me demande ce qui est passé par la tête des graphistes et publicitaires. Sinon aucun bonus, pas même une petite bande annonce à ce mettre sous la dent, dommage.