On the road again...
Cloud Atlas.
Je m'éclipse quelques temps physiquement mais le blog est plannifié pour programmer des chroniques tous les deux/trois jours. Cette disparition m'est providentielle car j'étouffe un peu au boulot et sans doute est-ce mon petit côté misanthrope mais j'ai de plus en plus de mal avec les gens. En premier lieu certains autres cinéphiles sur des blogs et forums. Je ne vais évidemment pas crier sur tous les toits que je m'absente, j'ai failli crier à moi-même ou des proches que je voulais arrêter de mêler mon grain de sel en certains lieux. Mais c'est impossible, j'aime trop parler des films et autres oeuvres qui me passionnent pour me taire véritablement.
Ce que je déplore c'est... je sais pas, il y a tout autant un manque d'ouverture que de curiosité mêlé à un peu de bêtise. Mais peut-être suis-je intransigeant moi aussi et très bête à ma manière ? Qui suis-je pour me plaindre des gens comme ça ? Mais quand je lis ailleurs à propos de 2001 l'odyssée de l'espace par un forumeur qui arbore le nom d'un grand cinéaste en pseudonyme (quand on choisit un pseudo qui fait référence au cinéma, faut assumer un minimum hein), que "le film n'est pas intéressant parce qu'entre-autres les personnages ne sont pas développés et qu'il y a un suspense qui déçoit à chaque fois", les bras m'en tombent. Ce jour là, ça m'a complètement énervé, littéralement. C'est le genre de truc qui me donne envie de balancer sans réfléchir à la gueule de mon interlocuteur que le cinéma c'est aussi et avant tout le spectacle de l'image et du son. Que si tu veux des personnages développés, tu n'as qu'à lire un livre ou regarder une série. Qu'un chef d'oeuvre comme Koyaanisqatsi n'a aucun personnage et que c'est l'essence même du cinéma (image et donc son... enfin musique de Philip Glass) qui ici, affirme toute sa suprématie et ne parlons pas des films muets, notamment des géniales oeuvres d'Epstein dont je parlerais ici un jour prochain (j'ai toujours voulu parler du Tempestaire sans jamais avoir eu le temps).
Mais je n'ai rien dit parce que je suis resté avec ma colère rentrée et surtout que plein d'autres choses me sont venu en tête. Notamment que cette personne oublie qu'avec le temps le regard et les goûts s'affinent et changent. Rien n'est jamais acquis. Que les conditions ne sont peut-être pas totalement réunies. Que rien ne l'empêchera d'aimer l'oeuvre par une voie détournée (tel ouvrage de tel spécialiste qui permet ainsi de reconsidérer d'un oeil neuf le film en question. Ou bien un extrait sonore ou visuel réemployé dans un documentaire, une pub ou un détournement), etc etc et j'en passe. Surtout, j'avais vraiment pas envie de rentrer dans un énième débat étant donné la subjectivité du cinéma (un intéressant livre à lire à ce sujet, "Qu'est-ce qu'un bon film ?" de Laurent Jullier). Sérieusement j'ai déjà donné pas mal dans la vie (un débat sur Michael Mann et Miami Vice qui tourna très mal) comme sur le net (expliquer pourquoi j'avais aimé Prometheus et récolter du mépris un peu partout face à des blogueurs, forumeurs et cinéphiles qui en restent parfois sur des arguments proches du "les personnages sont pas développés") alors partir dans un énième débat, merci bien quoi... surtout pour y gaspiller à nouveau des forces alors qu'il y a tellement mieux à faire.
D'ailleurs je ne dirais qu'un mot pour clore le débat : Ack.
Les reproches associés à un classique comme 2001 se retrouvent aussi pour de nombreux autres films. Le Godzilla de Gareth Edwards en fait partie par exemple (évidemment j'en parle parce que j'ai adoré le film et je regrette vraiment de manquer de temps à ce point pour en parler. Sans doute lors de la sortie DVD/Blu). Et on pourrait citer encore de nombreux films récents ou moins récents, classiques reconnus ou pas. Alors c'est quoi le problème ? Je deviens réellement intransigeant et élitiste avec le temps ou bien à cause de la société de consommation, les gens se sont de plus en plus ramollis et n'acceptent plus de faire des compromis face à un film, de le reconsidérer avec le recul, d'y réfléchir en se disant "hé c'était pas mal ça, y'a ce plan qui m'y a fait repenser et..." Je sais pas. Et cela vaut aussi bien pour les films disposant d'une imagerie puissante que les petits films basiques ou les "nanars" qui peuvent se révéler parfois bien plus attachants que d'autres oeuvres.
Même si ce n'est pas tout à fait exact, cela vient aussi en partie de moi. Je vais vous raconter un peu de mon vécu même si je me répugne souvent à le faire en ces lieux.
J'ai perdu mon oncle au début de l'année (maintenant vous savez ce qu'était cette note bizarre). Il avait une longue maladie et ça devait arriver, on attendait même que ça nous tombe dessus, histoire d'être "soulagés" dans la famille. J'ai été dévasté et déprimé pendant plus de 2,3 mois. C'est ce qu'on appelle le deuil... Vu que je n'en ai parlé à personne, je me suis plongé dans plein de choses, histoire d'avoir encore la tête à flot : c'était ça ou la noyade. M'occuper de mon blog, faire comme si tout allait bien, faire ceci, faire celà... Je me disais que je reparlerais de ça plus tard. Sans doute pour la fin de l'année où je fais le sempiternel bilan et m'apercevoir que "merde, cette année a été encore plus pourrie que l'autre". C'est dans ma nature d'être à la fois pudique avec ma propre vie comme je peux aussi être assez extraverti pour pas mal de choses. Pour ce genre de choses là, je n'en parle pas, pas envie d'embêter les gens avec. Il faut limite me torturer si je n'en parle pas de mon propre chef. C'est comme ça, je suis comme ça, compliqué par moments. Auparavant je me plaignais de vivre comme ça "à deux vitesses", aujourd'hui je m'en réjouis.
La musique, la lecture et le cinéma m'ont permis de commencer à regagner la lumière. Cette perte m'a même d'une certaine manière ouvert les yeux et l'âme. J'ai commencé à lire des choses mystiques sur un peu tout, je continue encore. D'une certaine manière en choisissant Jodorowsky comme mentor à la fin 2013 et découvrant la majeure partie de ses films, j'avais amorcé le chemin. J'ai déjà perdu Kubrick, Bergman, Antonioni, Marker et Resnais, il faut bien que je renouvelle mon stock de maîtres à penser non ? :) Bref, j'ai lu pas mal de choses et dans le même temps je me suis remis à aimer la vie, la musique, le cinéma, avec une force encore plus décuplée qu'avant, bien conscient qu'on a qu'une vie et qu'il faut en profiter du mieux possible. Du coup loin d'excuser les "mauvais films", j'ai fait mien la maxime de Truffaut qui consiste à être plus tolérant avec de nombreuses oeuvres.
La voici du coup au passage :
"François était tolérant. Il disait : "il est aussi difficile de faire un mauvais film qu'un bon." Quand on sait le travail, la douleur, les angoisses, le plaisir aussi, que représente le tournage d'un film, on ne peut plus critiquer d'une façon aussi aveugle et aussi violente, même si la critique peut être très constructive. Dans les films de Renoir, il y a des gens sympathiques et d'autres antipathiques, mais on ne peut pas les juger. Il y a cette fameuse phrase : "Ce qu'il y a de terrible sur cette terre, c'est que tout le monde a ses raisons." "
Jeanne Moreau dans le hors-série Le Monde, une vie, une oeuvre sur Truffaut, mai-juin 2014.
Mais oui je suis d'accord, et je trouve cela tout à fait admirable. A tel point que j'ai même embêté une blogueuse cinéphile de bon goût avec ça encore pas plus tard qu'il y a quelques jours qui se reconnaîtra.
Il faut dire que déjà avant ça, j'essayais déjà de défendre les petits films, d'expliquer pourquoi je les aimais, pourquoi ils me semblaient aussi dignes d'intérêt que des films plus réussis ou plus gros. Normal. Quand on aime le cinéma on va pas continuellement se mettre à taper dessus. Cela réduit le champ de découvertes des filles et c'est toujours gênant pour ceux qui ont font. La notion de plaisir coupable me fait un peu sourire même car un plaisir n'est pas coupable pour moi. Défendu face à la norme ou à la société, sans doute, mais coupable, cela signifierait qu'on devrait avoir honte d'aimer certaines choses face au plus grand nombre ? Je ne suis pas spécialement d'accord. Bref, je n'en aime que plus fort la vie, je m'extasie devant pas mal de choses, je prend en photos des petits détails de la rue, du street-art, des bricoles, tout ça va souvent sur mes albums facebook quand je ne garde pas tout sur disque dur. Ne croyez pas pour autant que je sois devenu naïf, je reste un grand cynique pessimiste mais ça ne m'empêche pas de cultiver en même temps l'optimisme quand je le vois passer comme un vieil ami. Je lui dis alors de rentrer, je lui sert un petit whisky (un tourbé qui sent le fumé), nous discutons, il fume, moi non en revanche, on passe un bon moment et on essaye de le garder.
Du coup je reviens à mon problème avec une poignée de cinéphiles, certes pas représentative forcément de tous. Vu que je considérais donc que j'étais en décalage avec des gens à nouveau, je me suis demandé si il n'y avait pas un rapport à voir dans les pratiques de consommation. J'ai demandé à un modérateur du-dit forum s'il y avait des sujets traitant du rapport du cinéphile face aux films. J'ai eu des liens vers plusieurs sujets, intéressants mais ne cadrant pas avec mes idées de cinéma plus larges. Et du coup.... je n'ai pas crée de topic. Quand je vois même qu'on crée des posts à propos de "futures redécouvertes", de films à réévaluer, je pourrais en citer plein. Des films aimés et détestés en majorité (il y en a de cités dans ce post, hé hé !) mais bon, à quoi bon leur dire que dans 10 ans ou plus, ces films seront réévalués ? Pour moi c'est l'évidence même (et je ne suis pas un prophète, juste quelqu'un qui essaye d'avoir du bon sens et de relativiser face à la vie de tous les jours). Il a fallu un nouveau superman par Zack Snyder pour qu'il découvrent soudain des qualités au classicisme du film de Bryan Singer que j'étais l'un des seuls à défendre depuis le début (c'est par ici et ça prend du temps à lire, bon courage). Alors à quoi bon m'égosiller à nouveau ? En vain en plus. Oui. En vain. Cela ne sert à rien de parler de cinéma en expliquant comment mon coeur parle ou ma raison quand elle relativise l'impact que produit une oeuvre puisqu'on ne m'écoute plus (ni sur le web ni dans la vie d'ailleurs). Il y a même des cinéphiles que j'appréciais vraiment, mais vraiment, qui ont pris une pente complètement négativiste, comme si le cinéma était mort depuis les années 2000 pour eux (c'est pas bien de faire de la concurrence à Godard hein). Et j'ai pas plus envie de leur écrire que les railler ou me moquer gentiment d'eux, non. Franchement je vois plus l'intérêt.
Je profite donc que je m'absente un moment pour faire une pause loin de tout ça, loin du net et paradoxalement vous servir des petits bidules sur ce blog, tout préparés, tous chaud et qui sortiront tous les deux/trois jours (prochain post donc, vendredi à 10h !). J'espère vous avoir encore avec moi à mon retour, lecteurs/lectrices adoré(e)s. Je vous aime, bisous.