Harmonium - Si on avait besoin d'une cinquième saison
Dernièrement, au Québec, je suis tombé sur ce disque. Si on avait besoin d'une cinquième saison d'Harmonium. Ce n'était évidemment pas innocent parce que d'une part, j'en avais entendu parler et en plus que bien il faut dire; d'autre part, je cherchais quelque chose de typiquement québecois lors de mon séjour. J'en ai trouvé d'ailleurs mais de toutes ces découvertes musicales dont je parlerais probablement un jour prochain, le disque d'Harmonium m'a le plus soufflé. A tel point que j'envisage de le mettre dans ma discothèque indispensable et personnelle (plus que malléable vu qu'elle s'agrandit d'années en années visiblement).
Ecartons quelques idées préconçues et pas forcément fausses d'emblée. A qui s'adresse ce disque ? A tous, pour peu que vous aimiez un folk doux croisé à un rock progressif qui mise plus sur l'aspect mélodique que technique. Si l'accent québecois ne vous rebute pas ou ne vous fait pas rire, c'est encore mieux. Enfin la poésie lyrique des textes, parfois volontairement naïf --on a parfois relevé des aspirations souverainistes (on est en 1975) sur Depuis l'automne. Rien de mieux que des paroles en apparence simple pour faire passer un message--, si elle ne vous rebute pas, vous fera plus qu'apprécier ce disque.
Cinq chansons, 4 parlées correspondant aux quatre saisons, 1 instrumentale qui fait figure de cinquième saison, imaginaire. Je vous arrête tout de suite, on est pas non plus dans le concept-album, terme souvent limité aux disques de rock qui n'ont pas toujours livré des oeuvres exemptes de tous défauts. Cela dit pour leurs défense, il y a des album-concepts (oui, ça marche aussi dans les deux sens) qui se révèlent sacrément passionnant. Même si j'ai du mal à m'avaler Tommy des Who en entier (curieusement le film passe mieux je trouve) ou alors si je suis dans un état sacrément "autre", il y a quand même des fulgurances qui me laissent baba. Quand à des disques comme Animals des Pink Floyd ou The lamb lies down on Broadway (quel titre !) de Genesis, je suis K.O et admiratif tout le long d'ailleurs.
Pour l'anecdote, un Harmonium c'est ça à la base.
Ici si concept album, il tient en fait du jeu. Serge Fiori (rien à voir avec Patrick hein), Michel Normandeau et les autres musiciens livrent une musique qui, certes, peut correspondre aux sentiments inspirés par chaque saison (les saisons de Montréal surtout), mais c'est avant tout une musique entraînante, fascinante, douce, ensoleillée même, parfois triste, toujours riche à chaque écoute. Et chose surprenante qui mérite d'être soulignée, il n'y a pas de batterie ni de percussion, rendant l'ensemble des plus accoustiques et intimistes, le rythme étant en quelque sorte formulé par la basse.
Du coup, comment décrire ce folk-rock un brin prog (deux morceaux longs, Depuis l'automne avoisinant les 10 mn et Histoire sans paroles qui lui, instrumental, fait 17 mn) si ce n'est qu'en disant qu'on a affaire là à quelque chose qui mêle Francis Cabrel (ou Michel Fugain) avec la mélodicité d'un David Crosby ? C'est un brin caricatural, aussi rien ne vaut d'écouter les chansons avec un petit tour d'horizon...
- Vert ouvre le disque. Avec sa progression tranquille, il symbolise le printemps.
- Dixie ensuite correspond à la chaleur de l'été. Et ce titre l'est, chaleureux, assurément. Référence au dixieland probablement où ici, l'énergie typiquement jazz apporte une belle surprise. Ma préférée de l'album avec celle qui suit.
- Depuis l'automne... Bon là, c'est évident. Un titre avec un refrain noble, mélancolique et toujours revenant comme les feuilles mortes qui à chaque fois tombent et traversent le décor, portées par le vent.
- En pleine face. L'hiver. Un titre donc en voie de glaciation qui ne se réveillera que tardivement. Un beau morceau cela dit à ne pas négliger.
- Enfin, Histoire sans paroles, alias la cinquième saison. Morceau instrumental surprenant (bien avant Radiohead, on à déjà là l'utilisation des ondes martenot pour créer un fond ambiant) plein de sonorités diverses. Une pièce de résistance assez longue donc qui, curieusement, m'emporte moins que le reste du disque.
On pourra se gausser de la poésie du groupe mais force est de constater que la magie demeure et qu'encore aujourd'hui, le disque est vrai enchantement.