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Chroniques visuelles
24 juin 2018

Voyage of the acolyte

 

voyage

 

Etrange année 1975.


En cette année, Peter Gabriel quitte le navire Genesis, éreinté par des (dé)pressions de toutes sortes, notamment du point de vue personnel où il faillit perdre sa fille et que l'on peut voir l'énorme et fabuleux (c'est mon point de vue perso) double album The Lamb lies down on Broadway comme une sorte d'exutoire personnel de l'archange noir de la Génèse. C'est aussi cette année alors qu'on ne donne plus trop cher de la bande à Gabriel & Cie que paraît le premier album de Steve Hackett, artisan consciencieux du son du groupe qu'on a alors à l'époque souvent oublié ou relégué aux oubliettes.

 

Pourtant Steve compose. Il a souvent composé, depuis qu'il est arrivé dans le groupe sur le second album, Nursery Cryme (1971). Et quand bien même, on lui doit un son de guitare qui à ce moment là donne une sacrée fougue au groupe. Ah The return of the giant Hogweed. Mais surtout le solo fabuleux d'un Firth of Fifth sur Selling England by the pound (1973), mamma mia. Et à côté donc de ce travail mélodique comme je disais, Steve compose de petites bricoles pleines de chaleur et de mélancolie mêlées qui réflètent tout aussi bien l'âme de la Génèse que celle de son créateur guitariste : Horizons (sur Foxtrot - 1972), After the ordeal (sur Selling...)....

 

Le hic c'est qu'à l'époque, à l'instar de Gabriel, Hackett se sent déjà à l'étroit. Tony Banks a alors commencé sa main-mise sur le groupe pendant plusieurs albums. Ce qui en soit n'est pas forcément une mauvaise chose tant ces derniers s'avéreront faire coïncider pleinement le besoin de poésie musicale en dehors de l'esthétique jugée par trop théâtrale de Peter Gabriel. Exit d'ailleurs les costumes compliqués, place à quelque chose de plus simple et proche du public avec un Phil Collins jovial qui raconte des contes en musiques un poil moins alambiqués mais tous aussi passionnants.

 

Inutile de refaire la Génèse donc, d'autres théologiens de la musique s'en sont déjà bien donné à coeur joie, on remarquera toutefois que A Trick of the Tail et Wind and Wuthering (tous deux de 1976 ! C'est ce qui s'appelle battre le fer pendant qu'il est chaud...) dans leur genre n'ont nullement à rougir face aux albums de la période Gabriel. Genesis accepte pleinement sa mutation face à une époque qui change trop vite (et s'empressera de la nommer chef de file des "dinosaures du prog" avec YES, mais ça c'est une autre histoire). Je considère même perso Wind and Wuthering comme le second grand disque du groupe après The Lamb..., c'est dire.

 

Et puis il y a le premier disque solo de Hackett donc au moment où le groupe séparé de son chanteur initial se rentre dans son cocon pour muer. Si on devait nommer une trilogie de cette période, voilà le chaînon manquant qu'on oublie régulièrement, le troisième album qui n'a lui aussi pas à rougir et face à A trick et Wind and... mais aussi face aux albums de Genesis qui ont précédé.

 

Pourquoi ? Parce que tout bonnement Hackett s'y livre pleinement avec une sincérité et un savoir-faire touchant qui en font plus que "l'album solo d'un guitariste". Et si certaines pistes sortent du lot et s'avèrent des expérimentations fourre-tout avant gardistes plus ou moins sympathiques, le reste est dans la droite lignée de ce son éthéré de guitare, ce romantisme noire vénéneux déjà développé et infusé avec Genesis. D'ailleurs, histoire de le rattacher encore plus, Phil Collins et Mike Rutherford, pas chiens, viennent jouer dessus, basse, batterie et un peu de chant pour le Phil. On notera qu'il n'y a pas Tony Banks, le même Banks qui écartait un peu les compositions de Hackett au profit des siennes ou du travail collectif du groupe. Petite vengeance.

 

La pochette peinte par Kim Poor (alors compagne de Hackett) à l'aquarelle est une invitation au voyage, de même pour les titres des compositions qui s'inspirent des cartes du tarot (L'ermite --the hermit--, la tour --A tower stuck down--, les amants --The lovers--....). Et quel voyage !

 

Ace of wands en ouverture frappe d'emblée au recul par le fait qu'il n'est pas dans la même tonalité que le reste de l'album. Le titre s'avère une synthèse de tout ce que peut faire Hackett à la guitare, en mode "Je fais mon Jeff Beck". Le titre varie à chaque fois constamment les aller-retours, les changements de style mais reste intriguant.

 

Hands of the priestress (part 1 et 2) introduit pleinement cette mélancolie tenace qui va cumuler sur tout l'album, notamment deux sommets que sont le poignant The Hermit et le "bipolaire" Star of Sirius. Sur ce dernier c'est Phil Collins qui chante tandis que la chanson plane entre la joie pure et une certaine inquiétude théâtrale (vers 3mn) avant de redécouvrir la féerie et la joie. Sacrés bijoux !

 

Et puis il y a les 11mn de Shadow of the Hierophant, pièce prog purement majestueuse où Sally Oldfield (soeur de vous savez-qui...) est invitée au chant dans un premier temps alors que lentement la tempête gronde et menace. Un morceau magique comme aurait pu l'écrire le King Crimson des débuts, j'vous dit.

 

Au final un album fin, sensible et facile d'accès que n'importe qui peut écouter et apprécier sans problème, même les réfractaires au rock progressif, c'est dire !

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