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Chroniques visuelles
17 décembre 2006

Le jour des morts vivants (Day of the dead)

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"Une vingtaine de balles de 12,7 farcirent le corps de Justin qui explosa presque, lui aussi. Le soldat dégueula dans son masque à gaz et faillit s'étouffer le temps qu'un autre lui en mette un propre sous le nez."

Stephen King - Les Tommyknockers. (*)


Zombie
(alias "Dawn of the dead pour les puristes) étant à peine sorti sur les écrans que Romero se remit au travail. Pas question de laisser écouler encore une decennie comme ce fut le cas entre les sorties de La nuit des morts-vivants (1968) et Zombie (1978), le réalisateur de Pittsburgh à pleins d'idées en tête et compte bien les utiliser. Après tout, il faut battre le fer pendant qu'il est chaud, la sortie de Zombie et les premiers chiffres de recettes confirmen bien que l'on attendait enfin une digne suite (du moins dans le même univers) à la nuit des morts vivants. Bref échaudé par ce début de reconnaissance enfin mérité (les droits de "la nuit des morts-vivants" étaient tombés dans le domaine public ce qui en faisait un film très rentable pour la télévision américaine mais Romero ne gagna alors pas un sou...) tant publiquement qu'artistiquement et professionnellement (surtout auprès des producteurs), l'ami George écrit un long script ambitieux décrivant dans un avenir pas si éloigné, un système de caste et un affrontement dantesque entre derniers humains et hordes de zombies.


"L'ébauche de scénario du Jour des morts vivants, George Romero la laisse de côté quelques temps. Il n'y reviendra qu'après avoir emballé Creepshow en 1982. (...) Ce Jour des morts vivants débute sur une île tropicale, plus précisément dans une cité balnéaire desertée. Les immeubles y sont dégradés, les rues entièrement vides. Seuls quelques alligators s'y promènent en toute quiétude. Une tranquilité toute relative puisque perturbée par l'irruption d'un mort vivant affamé, signe qu'il n'est pas le seul de son espèce à battre le pavé dans le secteur et même au délà...

Arrive alors un bâteau de pêche non pas rempli de marins mais de guérilleros spécialisés dans la recherche d'éventuels survivants et d'enclaves protégées. S'ensuit alors une séquence anthologique que Roméro voit déjà comme le clou de sa carrière : un combat monumental où s'affrontent humains et zombies, telles deux armées en mouvement. Seuls trois guérilleros survivent au raid carnassier. Réfugiés dans la jungle, ils découvrent un ascenseur menant tout droit dans les entrailles d'une base militaire souterraine. A l'intérieur, les survivants se retrouvent nez à nez avec un commando de soldats dirigé par un chef mégalomane. Eux aussi s'emploient à domestiquer les morts-vivants, les nourrissant même de chair humaine entreposée dans des caissons frigorifiques. A ce niveau de l'histoire, Romero s'arrête à une satire d'une civilisation constituée de différentes castes. D'un côté les "humains de base" regroupés à l'extérieur dans des stalags proches de la prison à ciel ouvert de New York 1997, lieux de miséricorde où la violence, la drogue et la dépravation sexuelle bercent le quotidien des résidents. C'est évidemment là que les militaires se servent en victuailles destinées à leurs cobayes. Des scientifiques composent l'essentiel de la seconde caste. Chargés d'étudier les morts-vivants sous toutes les coutures, Romero les décrit "comme des chercheurs venant d'inventer la bombe atomique tout en souhaitant que l'humanité n'ait jamais a s'en servir. La responsabilité de leurs actes, de même que le fruit de leurs recherches, ils les laissent à l'armée, la dernière caste..."

Mad Movies - Hors série George.A.Romero.


zarbleuh
Moi les étudiants qui me font chier, je les enchaîne. Regardez celui-là derrière, même pas foutu de me finir un exposé sur Dario Argento. Quelle misère !



Vous auriez remarqués outre le fait que "frigorifique" rime avec "horrifique" (y'a un concept à tenir les gars là...) que Romero reprendra de nombreuses idées de ce script tant dans ce film que Land of the dead. L'armée de zombie en guerre, ce sera land of the dead, quand aux militaires et scientifiques, c'est pour "day of the dead". Les civils tenus à l'écart à l'extérieur, "land of the dead" (encore que ce dernier ira plus loin qu'un simple constat de pauvreté. Pour moi "land of the dead" est carrément une critique du pouvoir en place ni plus ni moins), etc...

Au final, avec ce script dantesque, Romero est passé d'une quarantaine de pages à plus de 200 et le devis qui en résulte de 6,5 millions de dollars lui ferme les portes des studios notamment de UFD sa société de distribution devenant trop frileuse devant un tel chiffre. Alleché par les 15 millions de dollars de recettes ramassés par les dents de la mer 3 lors de sa première semaine d'exploitation, notre George pense un temps a un film de zombie bien crados en 3D. Problème : encore plus cher, trop technique. Les discussions commencent à devenir houleuses entre le distributeur et Romero d'où la réplique de ce dernier, amer : "Rambo peut massacrer tous les vivants alors qu'on m'empêche de tirer dans la tête des morts. Deux poids, deux mesures."  Finalement Romero, Rubinstein (le producteur, également producteur de Zombie) et UFD se mettent d'accord sur une enveloppe budgétaire de 3,5, pas plus. Revoyant alors son script pour un budget moindre, Romero est obligé de tout changer, quitte à tout réécrire...

"Littéralement essoré, ressassant à l'infini les mêmes scènes et personnages, il reprend à zéro. " Je n'avais plus que trois semaines pour l'achever. Je suis resté assis la première semaine à réfléchir intensément, à essayer de remettre en ordre un très vaste puzzle, tout en prenant des notes avec un magnétophone. Une période très éprouvante, difficile sur le plan psychologique. Une fois reconstituée la trame d'une histoire qui entrait dans le budget alloué, je suis passé au stade de l'écriture." "

Mad Movies hors série - George A.Romero.


bublegum
Woua, Led Zeppelin c'est trop bien ! (**)


Le film commence progressivement à prendre forme et s'inscrit dans la continuité des précédents volets. A l'invasion puis la débacle précemment vues, répondent le chaos et l'isolement. Un grand monde vide dont on peut imaginer quelques enclaves de survivants ça et là, disséminées, qui ne se parlent même pas, parce que tout probablement elles n'en ont pas les moyens (Mc Dermott le radio du film se plaint aux militaire que son équipement date de la seconde guerre mondiale et que tous les relais radiophoniques longue portée ont depuis longtemps cessés d'emettre) ou qu'elles ont baissées les bras. Le film montre clairement un refuge souterrain tenu par une poignée de militaires régnant en tyrannie (et glandeurisme quand on voit les autres militaires qui entourent l'inflexible colonel Rhodes) sur des scientifiques apeurés à leur solde et 2-3 civils qui peuvent leur être utile (John le pilote d'hélicoptère et Mc Dermott, le radio), face au monde extérieur peuplé aux 9/10 èmes de Zombies affamés et voraces.

D'emblée, des personnalités se dégagent entre premiers et seconds rôles, les seconds faisant généralement de la bonne chair à pâté. Au rang des personnages importants, on notera donc l'importance de Sarah (Lori Mc Cardille), véritable femme forte là où une Barbara s'évanouirait de peur (premier volet) et où une Francine (second volet), même femme d'action se retrouverait néanmoins submergée par l'adversité. Sarah impressionne face à ces militaires brutaux et stupides justes enclins à parler graveleux, à se réfugier dans les blagues/insultes de sexe ou faire parler leurs armes. En fait, tous ont peur, tous sont terrifiés mais Sarah est la seule qui ne le montre pas même si le spectateur ressent parfaitement la tension qui se fait jour en elle et menace vers la fin de se briser.

colllllique
Ah merde ma collique me reprend.


Ensuite Rhodes (Joseph Pilato (***)), implacable et inflexible dans le rôle d'un colonel sur le point de craquer. Constamment dans la pression, parfait salaud dont le but (tout à fait louable à la base) est de maintenir ses hommes en vie, il est une boule de nerfs prête à exploser. Pour lui, la situation n'avance pas, ce qui l'énerve de plus en plus. Presque paranoïaque on sent chez lui, le besoin de faire presque un coupable, surtout cette femme qui semble défier son autorité et ces scientifiques qui ne mènent rien...

Troisième personnage marquant de ce triangle improbable enfin, il nous faut parler de Bub alias aussi "boubou", zombie de son état incarné avec charisme par Howard Sherman. Celui-ci en observant attentivement la petite fille de Romero sur le tournage prend conscience de cette faculté de découverte progressif et naturel des choses qu'ont les enfants et bébés en bas âge face à un environnement inconnu et calque son jeu là dessus avec naturel. Il devient donc Bub, zombie ancien tireur dans l'armée sûrement qui accède à sa mémoire et progressivement redécouvre des choses issues de son passé humain.

C'est avec ce personnage que Romero commencent à prendre fait et cause avec les zombies : Devant Bub et la brutalité des militaires, on préfère effectivement un monstre ayant de vrais sentiments humains qu'une créature qui n'a d'humain que l'apparence (Rhodes). L'évolution progressive et passionante du zombie continuera lentement mais sûrement avec Land of the Dead où cette fois ils peuvent "communiquer", se mettre en groupe, et comprendre, voire ressentir la souffrance des autres.

twixle
Ah non, pas de ventre, pas de Twix © !

Dans les personnages secondaires, notons le Dr Logan, qui nous joue ici le savant fou (et ce n'est pas fait exprès qu'on l'appelle "dr Frankenstein" croyez moi, d'où le fait que ici Bub, sa créature, tentera de le venger et non le détruire. Merci du sympathique détournement mr Romero) ainsi que les deux civils, un peu en retrait. Notamment le personnage noir de John là où dans les autres Romero, c'étaient des meneurs, symbole d'une classe opprimée de l'Amérique qui prenait en main son destin, ici il se fait légèrement en retrait, comme si il annonçait le zombie noir meneur de "Land of the dead", c'est flagrant.

On remarquera aussi que pour ce volet, Romero se concentre plus sur la psychologie des personnages que l'action. Bien sûr on ne pourra pas passer sur les grossiéretés qui rendent les militaires caricaturaux et ennuyeux (comme si Romero avait fait exprès d'écrire leurs textes en ce sens. D'ailleurs je ne doute pas qu'il l'ait fait pour ça, pour les rendre franchement ineptes à nos yeux) et parfois plombent l'histoire mais il s'en dégage un malaise et une tension constante doublée d'une belle nostalgie d'un monde disparu, l'âge d'or d'avant les zombies que, remarque personnelle, j'aurais préféré encore plus développé et noir (dialogue entre John, Sarah et Mc Dermott dans le jardin artificiel). Mis à part quelques dialogues plombant, Romero ne gâche en rien son propos et se montre toujours aussi fort dans la description d'une société au bord du gouffre et signe qu'il n'a pas perdu la main, les rares scènes chocs fonctionnent parfaitement dans le film pour marquer durablement l'esprit (notamment la scène du début, dans la chambre et son fameux "mur de mains", scène formidable pour moi et toujours aussi forte même si je commence a la connaître par coeur...) et faire de ce film un grand film.

Annexes...


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  • Aux dernières nouvelles, "Day of the dead" fait l'objet d'un remake inutile par notre tâcheron Steve Minner pourtant responsables de 2,3 breloques sympathiques, House et Vendredi 13 en tête. Les zombies courent (la grande mode quoi), sautent comme des crapauds et y'a un casting de djeunz. Vous pouvez déjà voir un aperçu du désastre annoncé pour 2007 par ici.
  • Pour l'anecdote, le début de la partition musicale du film par John Harrison fut reprise magistralement en sample par le groupe Gorillaz sur leur premier album. Il s'agît du morceau "M1A1", la piste 15. A vos ghetto blasters mes amis !
  • Vous pouvez lire une sympathique chronique de Day of the dead par ici aussi.
  • Une chronique de Day of the...Ah non, c'est Land of the dead sur l'artcancre. Bah tant pis je leur fais un peu de pub, pas grave...
  • Et voici le trailer, bande de petit veinard...



Vous pouvez aussi lire mes propres chroniques antérieures de La nuit des morts vivants et Zombie sur ce blog.

Ne me reste plus qu'a traiter prochainement de Land of the dead (2005) et la boucle sera bouclée...en attendant "Diary of the dead" (2007).



(*) Je voulais mettre à la base une citation de "Cellular", le King qui rend hommage à Romero (et Matheson) mais ayant un peu largué King depuis quelques années, je ne disposais pas du bouquin. D'autres part, les Tommyknockers sont tellement vampirisés par le pouvoir dont ils disposent qu'ils semblent presque devenir des zombies, d'où la citation en parallèle...

(**) Mine de rien, je crois que Bub écoute de la musique classique, mais je ne suis pas sûr donc si quelqu'un a l'information, je suis preneur...

(***) ...Que l'on retrouvera plus tard pour un très court rôle de faux Dean Martin dans Pulp Fiction. Sacré Tarantino va !

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Commentaires
L
Oué un petit Baby Cart. Oué avec un petit Bach en fond. Meilleur compositeur absolument, aux côtés de Frank Zappa pour le 20ème siècle. Respect messieurs-dames.<br /> A bientot Nio, je dois m'exiler pour formation de franchise et manager d'autres entreprises.<br /> Je te souhaite une très bonne année et plein de bonheur. Bonjour à tout le monde sur le cinoche.
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N
Shaman, je sens en toi la fatigue des fêtes du nouvel an. Repose toi, regarde un baby cart. :)<br /> <br /> Et puis tout le monde sait que le meilleur compositeur au monde c'était Bach.<br /> <br /> <br /> <br /> * fuit loin *
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L
Et pis de toute façon, la 9ème symphonie c'est Beethoven. AIE! AIE!
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L
Deja Mozart c'est avec "t".<br /> AIE ca fait mal. AIE AIE AIE!
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L
Oui oui c'est de la musique classique c'est je crois la 9ème symphonie de Mozard (si je me trompe ruez moi de coup) qu'on entend dans "orange mécanique" aussi. Ou alors, Jimmy Page jouait de la trompette.
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