Air Doll
Fiche Cinetrafic du film.
A Tokyo, une poupée gonflable prend soudainement vie et développe progressivement des sentiments humains. Comme un nouveau-né, elle découvre un monde inconnu qu'elle aspire à découvrir. Le jour, elle s'aventure dans les rues, fascinée, cherchant des réponses au fait d'être en vie. La nuit, elle revient chez son propriétaire...
Air Doll est un film piège à l'image de sa créature, faussement vide en apparence. Tour à tour baignant dans le conte de fée et une certaine dureté à la fois, Hirozaku Kore-Eda livre un film aux couleurs pastels qui n'empêche pas de faire sourire et émouvoir et surtout questionner sur la vie et la mort. Ce n'est pas une surprise, la mort est là depuis le début de carrière du réalisateur, sujet traité tour à tour sur plusieurs films et plusieurs tons (pensons à Afterlife (1999) où c'était même le sujet principal, ou Still Walking (2008)). Ce qui est surprenant et touchant, c'est qu'ici cette réflexion déguisée prenne les contours d'une poupée gonflable. Poupée faussement vide du fait que l'air est impalpable au toucher (tout au plus peut-on le sentir mais pas le capturer réellement comme une matière solide), mais véritablement pleine de part ses pensées, ses actes, sa trajectoire et celles qui vont croiser sa route.
L'écueil qui était à éviter absolument (et que Kore-Eda réussit en grande partie --mais pas totalement toujours puisqu'on en revient au fait évident que la poupée est un ersatz servant à résoudre le désir sexuel par de multiples détails) était de livrer un film qui verserait dans le glauque et le misérabilisme le plus total. Or, le cinéaste décide de passer cet aspect par de multiples fondus au noir judicieux, ou en ne s'attardant pas sur les scènes pouvant être dérangeante. Une sorte de pudeur ? Non, un acte de voir, et par là-même de filmer qui tient d'une morale couplée à un vrai respect de son public. A sujet diantrement casse-gueule donc, il y a des choix à faire. Et inversement, en montrant une scène de réanimation (regonflage de la poupée), le cinéaste délivre une vraie magie, s'attarde sur le fait de redonner la vie et filme un orgasme par le souffle. C'est beau, presque osé et surréaliste (c'est ce que j'ai vu de plus excitant cette année même).
Et on finit par s'attacher à notre poupée (Il faut dire que Doona Bae avec son regard mutin livre une performance formidable, bien plus importante que dans The Host où déjà elle excellait en paumée sportive maladroitement timide et lente). Mais le réalisateur ne néglige nullement les autres personnages, que l'on revoit le plus souvent dans de multiples vignettes, chez eux, sur le trajet, au travail. Par là-même, c'est toute une toile de figures reliées par leur propres solitudes qui est tracée. La simple action de poser la tête sur quelqu'un (geste d'amitié, d'amour) revient continuellement, geste simple mais plus important qu'il n'y paraît. En grattant le vernis des relations entre hommes et femmes (voire hommes-poupée ! La rencontre de la poupée et de son créateur s'avère un des meilleurs moments du film), le film touche et peut atteindre en plein coeur du spectateur.
Air Doll est un film étrange au final. Mi-chronique sociale, mi-romance, mi-fantastique (la "naissance" de la poupée n'a pas besoin d'utiliser d'effets spéciaux coûteux et voyants. Kore-Eda joue adroitement sur le son et l'image, ça en devient presque sensitif), mi-drame, on joue sur plusieurs tableaux sans toutefois se résoudre à en choisir un au final. Parfois drôle, parfois dur, il laisse pourtant une impression durable en tête. C'est un film étrange qui ne demande rien, joue patiemment de son côté et se pose des questions dans son coin. Au spectateur de choisir d'aller jouer avec notre poupée et de faire un brin de chemin avec elle. Assurément un bel ovni pour ma part.
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Air Doll- Un film de KORE-EDA Hirokazu En DVD le 21 septembre 2011. Edité par Océan Films Distribution.
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